Ousman* a 16 ans et vient de Gambie. Il a passé deux ans en Libye et a tenté à trois reprises de s'enfuir par la Méditerranée. Par deux fois, Ousman a été intercepté en mer par les autorités libyennes et a passé 43 jours en captivité arbitraire. Le 14 février 2023, il a été sauvé par l'Ocean Viking lors de sa troisième tentative de traversée de la Méditerranée centrale pour se mettre en sécurité. L'équipe de recherche et de sauvetage de SOS MEDITERRANEE l'a trouvé avec 83 autres enfants, femmes et hommes dans un canot pneumatique surchargé dans les eaux internationales au large des côtes libyennes. A bord, il nous a raconté une partie de son histoire.

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"Ma mère a essayé de lui parler, mais il a commencé à la battre aussi".

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"J'ai perdu mon père quand j'étais enfant. Ma mère s'est mariée avec un autre homme qui me détestait. J'avais peur de lui. Il ne me donnait aucune chance. Il essayait toujours de me battre et me disait que j'étais inutile. Il me mettait constamment à la porte de la maison. Ma mère a essayé de lui parler, mais il a aussi commencé à la battre. Un jour, ma mère m'a dit que ma seule chance était de quitter la Gambie et d'entreprendre ce voyage. C'est ce qui m'a poussé à partir en septembre 2021, à l'âge de 14 ans. J'ai vécu tellement de mauvaises choses pendant ce voyage".

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"Le désert était très difficile".

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"Il m'a fallu quatre mois pour atteindre la Libye. J'ai traversé le Sénégal et l'Algérie. Le désert était très difficile, lors de la traversée, j'étais sur un minuscule pick-up chargé à bloc de personnes. Il y avait beaucoup de défis dans le désert, mais nous devions trouver notre chemin. On peut perdre la vie parce qu'il n'y a pas de nourriture et pas d'eau. C'était très dur".

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Libye

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"Je suis resté deux ans en Libye, de 2021 à 2023, et j'ai maintenant 16 ans. Quand je suis arrivé, j'ai commencé à travailler pour gagner un peu d'argent, car je n'en avais pas. Je me suis occupé de moi et ma mère m'a donné tout l'argent qu'elle avait. En Libye, je m'occupais d'animaux qui appartenaient à un homme. Cet homme était bon avec moi. Dieu merci, il m'a aidé. Mon père était agriculteur. En Gambie, j'avais l'habitude de garder les chèvres".

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Intercepté deux fois par les garde-côtes libyens

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"J'ai essayé trois fois de traverser la mer. Deux fois, j'ai été intercepté. La première fois, j'ai réussi à échapper aux Libyens [garde-côtes] et à regagner la terre ferme. La deuxième fois, ils m'ont à nouveau intercepté et mis en prison**. Les Libyens [garde-côtes] ne sont pas gentils. Ils n'ont aucun respect pour l'humanité".

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En captivité arbitraire en Libye

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"J'ai passé 43 jours en prison.** Ils ne nous ont pas donné assez à manger. Je mangeais une fois par jour. Je dormais sur un sol sale, sans matelas. Il faisait froid. C'était dur pour moi. J'ai souffert. Être en prison était très difficile pour moi. J'ai même pleuré et je me suis demandé pourquoi j'étais venu en Libye. J'étais fatigué ; j'avais beaucoup de difficultés. Si tu as de l'argent, ils te libèrent. Si tu n'as pas d'argent, tu vas mourir là-bas. Personne ne t'aidera. Ma mère a dû vendre ses vêtements pour subvenir à mes besoins et me faire sortir de cet endroit. C'est la Libye. C'est très difficile pour les Noirs. Mais je savais que je devais y faire face. J'ai quitté mon pays pour faire ce voyage, pour rendre ma famille heureuse. C'est mon rêve. C'est ma foi".

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La traversée

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"C'était difficile pour moi quand j'étais en mer. Le petit bateau dans lequel je me trouvais se balançait beaucoup dans les vagues. Je me sentais mal. J'avais envie de vomir. Je n'avais rien à manger, j'étais fatigué. J'ai même cru que j'allais mourir, jusqu'à ce que je voie l'Ocean Viking. J'étais tellement heureux que j'ai demandé à mes amis : "Je rêve ?" Ils m'ont répondu "non, c'est la réalité". Sur le moment, je n'arrivais pas à y croire, j'étais tellement fatiguée. J'avais froid et j'étais anxieux parce que j'avais peur des Libyens [les garde-côtes]. Je savais que s'ils m'avaient attrapé, personne ne m'aurait fait sortir de prison cette fois-ci. Ma mère est maintenant fauchée, elle n'a plus d'argent. J'avais peur, mais je devais prendre le risque pour ma mère. Je dois aider ma mère. Je suis l'aînée des enfants ; je dois la rendre fière. Je sais que la vie n'est qu'un risque. C'est la troisième fois que je tente cette traversée et j'ai réussi, je suis tellement heureuse. En Europe, j'aimerais terminer l'école et étudier l'art, peut-être même devenir journaliste ou historien. J'ai déjà appris beaucoup de choses dans la vie... Je veux retourner à l'école. C'est mon rêve".

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L'illustratrice MarieMo Adatte des Editions Antipodes a demandé à Ousman où il voulait être dessiné. La réponse d'Ousman :

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"Sur l'Ocean Viking, parce que c'est ici que je passe les meilleurs moments de ma vie".

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* Le nom a été modifié pour protéger la personne

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** Prison ou prison font référence aux centres de détention en Libye.

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